sábado, 6 de febrero de 2021

La mort avant Lampedusa - Libération

Les embarcations de fortune se sont multipliées sur la Méditerranée. Les accidents tragiques aussi. Au moins 1500 migrants partis de Libye seraient décédés depuis mars.

Par LIBÉRATION.FR

Jeudi, un bateau en bois de 20 mètres de long, où s'entassaient plus de 350 migrants fuyant la Libye, a débarqué sur la petite île de Lampedusa, un confetti de 20 kilomètres carrés perdu au sud de la Sicile. Plusieurs dizaines de passagers sont morts de faim et de soif pendant la traversée, selon des survivants.

Ce drame s'ajoute à une longue série. Depis le début de l'année, l'afflux de migrants sur les côtes italiennes s'est intensifié. Au départ, les embarcations de fortune venaient surtout de Tunisie, puis de Libye. Au départ, «ils partaient sur de petits bateaux pneumatiques qui ne pouvaient transporter que quelques dizaines de personnes». «Maintenant sur nos côtes arrivent d'énormes embarcations délabrées conduites par des marins sans expérience où s'entassent parfois jusqu'à 800 personnes», explique la porte-parole du Haut commissariat pour les réfugiés (HCR) en Italie, Laura Boldrini.

Depuis le début des combats en Libye, à la mi-mars, quelque 24.000 migrants partant de Libye auraient réussi à rejoindre les côtes italiennes, selon le Haut commissariat pour les réfugiés du HCR de l'ONU. Mais 1.500 migrants «au moins» seraient morts pendant la traversée. Ce n'est qu'une estimation, certaines embarcations ayant certainement coulé sans que personne ne s'en aperçoive.

Retour sur les principaux naufrages de ces quatre derniers mois

16 mars : Plus de 1.600 migrants, dont quelques femmes et enfants, débarquent à Lampedusa. Au total, la capitainerie recense 21 bateaux. Dans la nuit, une patrouille de la marine de guerre vient en aide à une embarcation à la dérive qui commençait à prendre l'eau, à environ 20 milles au sud de Lampedusa, à bord de laquelle se trouvaient 129 immigrés.

6 avril : Au moins 150 réfugiés somaliens ou érythréens sont morts ou portés disparus au large de Lampedusa. Plus de 200 réfugiés avaient quitté lundi Zouara, en Libye, sur une barque d'à peine 13 mètres de long. La tempête et l'excitation régnant à bord ont eu raison de la maigre embarcation. Les garde-côtes italiens dénombrent 48 rescapés.

9 avril : Berlusconi parle de «tsunami humain». Durant sa visite sur l'île, pas moins de quatre embarcations ont abordé la côte. «Ce n’est pas un problème italien, mais un problème européen», a-t-il répété, ajoutant qu’«il ne peut y avoir de réponse égoïste» face à ce «tsunami humain».

(Berlusconi, en visite à Lampedusa le 9 avril/Reuters)

19 avril : 500 migrants sont secourus par les garde-côtes italiens. L'embarcation, un vieux bateau de pêche d'environ 25 mètres de long, se dirigeait lentement vers la Sicile quand il a été intercepté par des vedettes des garde-côtes italiens qui l'ont alors dérouté et accompagné vers le port de Lampedusa, plus proche et plus sûr pour les réfugiés. Selon les garde-côtes, ils étaient 750.

(Des réfugiés libyens, le 19 avril, sur le l'île de Lampedusa /AFP)

8 mai : Trois cadavres sont retrouvés sous un bateau. La veille, des centaines de réfugiés fuyant la Libye et voyageant à bord de deux bateaux avaient déjà débarqué sur l’île de Lampedusa. 655 personnes, dont 82 femmes et 21 enfants, étaient à bord d’un premier bateau et 187, dont 19 femmes et un enfant, à bord du second, un bateau de pêche rouillé et surchargé.

18 mai : Une couronne de fleurs est symboliquement déposée à quinze mètres de fond, sur une des côtes de l'île italienne de Lampedusa, en mémoire des centaines de naufragés venus d'Afrique du nord.

--> A lire, dans Libé: «Quand la barque pour Lampedusa a cessé de répondre». Le témoignage de Wissem Alayet raconte l'odyssée fatale de son frère, qui a fait naufrage en voulant fuir la Tunisie.

--> A voir, une vidéo de sauvetage en mer, sur le site de l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés.

30 mai : 210 réfugiés libyens en provenance de leur pays sont secourus in extremis par les garde-côtes italiens. Victime d'une panne de moteur, leur bateau dérivait à environ 100 km au sud de Lampedusa.

1er juin : les autorités tunisiennes tentent de secourir quelque 800 migrants, coincés à une trentaine de kilomètres au large des îles Kerkennah, au sud de Lampedusa. Leur bateau de pêche est enlisé dans un banc de sable, les secours tardent à intervenir à cause des mauvais conditions climatiques. Finalement, le bateau, surchargé, chavire sous le poids des passagers après des bousculades pour tenter de monter à bord des petits bateaux de sauvetage dépêchés par les autorités.

Près de 600 réfugiés ont pu être secourus, et plus de 200 sont portés disparus. Le lendemain, 120 corps sont repêchés.

--> A lire: interview de Jean-Philippe Chauzy Porte-parole de l'Office des Migrations Internationales.

1er août : 25 migrants sont retrouvés morts asphyxiés dans la cale d'une embarcation délabrée d'une quinzaine de mètres, partie le samedi précédent et secourue au large de Lampedusa. 271 autres migrants ont survécu à la traversée.

(25 corps allongés, le 1er août, à Lampedusa/Reuters)

4 août : 350 migrants, entassés dans un bateau en bois de 20 mètres de long, arrivent à Lampedusa. Selon Mario Testa, médecin de MSF (Médecins Sans Frontières), présent à Lampedusa, les migrants «sont restés pendant six jours et six nuits en haute mer sans eau ni nourriture. Une femme marocaine parle d'une centaine de victimes. Ils seraient morts de faim et de soif, leurs corps ont été jetés à la mer.

5 août : Au lendemain de ce énième drame, plusieurs ONG réclament une mobilisation de la communauté internationale et notamment des navires de l'Otan pour secourir les migrants.

De son côté, le gouvernement italien accuse l'Otan de «non assistance présumée», assurant avoir demandé, en vain, l'intervention d'un navire de l'Alliance se trouvant à proximité du bateau en difficulté. Rome demande à l'Otan une «enquête formelle».