L'avocat général a demandé à la Cour de cassation de rejeter la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui avait entraîné, début mars, la suspension du procès de Jacques Chirac dans l’affaire des emplois présumés fictifs de la Ville de Paris.
Jacques Chirac le 7 mars 2011 à Paris (© AFP Bertrand Langlois)
L’avocat général a demandé, ce vendredi, à la Cour de cassation de rejeter la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui a entraîné une suspension du procès de Jacques Chirac dans l’affaire des emplois présumés fictifs de la Ville de Paris.
Les juges, qui ne sont pas liés par cet avis, se sont donné une semaine pour prendre leur décision, qu’ils annonceront le 20 mai.
Si la Cour suivait l’avis de l’avocat général, la voie serait dégagée pour une reprise, peut-être en septembre, du procès de l’ancien Président, suspendu début mars dès le deuxième jour d’audience, du fait de cette question posée par la défense d’un de ses neuf co-prévenu, Rémy Chardon.
Trois autres QPC, dont deux identiques à celle du procès Chirac, posées dans d’autres affaires, seront étudiées en même temps par la Cour de cassation, et devraient donc faire l’objet du même avis de rejet de l’avocat général. Toutes contestent la jurisprudence, construite et confirmée au fil des ans par la Cour de cassation elle-même, qui recule le point de départ du délai de prescription des infractions.
Celle posée au procès Chirac attaquait le principe de «connexité», par lequel un délai de prescription appliqué à une infraction peut valoir pour une affaire «connexe».
La quatrième QPC porte sur le sujet très sensible de la prescription des délits dits «dissimulés» (abus de confiance, abus de biens sociaux). Pour ces délits, la jurisprudence calcule le délai de prescription de trois ans à partir du moment où ils sont découverts et non du jour où ils ont été commis.
«Il n’y a pas lieu, à mon sens, à transmission des QPC»
«Il n’y a pas lieu, à mon sens, à transmission des QPC soumises à votre Cour», a déclaré l’avocat général François Cordier, jugeant que les questions n’étaient pas «nouvelles» et que la jurisprudence contestée ne portait atteinte à aucun droit ni aucune liberté fondamentale.
Selon lui, «la prescription de l’action publique ne saurait courir lorsque (la justice est) dans l’incapacité d’agir au regard du caractère occulte, dissimulé ou clandestin de l’infraction». «Sauf à admettre (...) l’impunité quasi-systématique de l’auteur des faits ce qui, on en conviendra, n’est pour le moins pas satisfaisant, si ce n’est choquant».
Me Patrice Spinosi, chargé de plaider trois des quatre QPC examinées, a, lui, tenté de démontrer leur caractère «nouveau» qui, à lui seul, devrait entraîner une transmission au Conseil constitutionnel. Sur le fond, il a considéré que la jurisprudence sur la prescription portait notamment atteinte au «principe fondamental (...) de prescription de l’action publique», ainsi qu’aux «principes de prévisibilité et de légalité de la loi». «Il ne s’agit nullement de critiquer la jurisprudence de la Cour de cassation», mais «d’apprécier cette jurisprudence ancienne avec un oeil nouveau», a plaidé l’avocat.
Instaurées en mars 2010, les QPC permettent de contester les lois en vigueur. Premier filtre, les tribunaux les transmettent à la Cour de cassation, qui a trois mois pour les faire suivre, ou non, au Conseil constitutionnel, qui a ensuite trois mois pour se prononcer.
(Source AFP)