Société 20/02/2010 à 10h08 (mise à jour à 19h50)

Treiber a laissé un mot avant de se suicider

REACTUALISE samedi A 20 heures

Accusé du double assassinat de Géraldine Giraud et Katia Lherbier, Jean-Pierre Treiber s'est pendu dans sa cellule de Fleury-Merogis. Sa mort met fin à l’action en justice.

382 réactions

Jean-Pierre Treiber, l'assassin présumé de Géraldine Giraud et Katia Lherbier,10 septembre 2009 au commissariat de Joigny. (© AFP Philippe Merle)

 

Le corps de Jean-Pierre Treiber sera autopsié dimanche à l’hôpital d’Evry (Essonne) où il a été transféré samedi, après son suicide par pendaison dans sa cellule de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis (Essonne). Son suicide met fin à l'action en justice.

«Il s’agit de déterminer avec précision les causes de sa mort et de procéder à plusieurs prélèvements», a précisé le procureur adjoint du parquet d’Evry, Michel Lernout.

Jean-Pierre Treiber, principal suspect dans le double meurtre de Géraldine Giraud et Kathia Lherbier en 2004, s’est pendu dans sa cellule samedi matin avec un drap, a-t-il confirmé. «Il faisait l’objet d’un contrôle à chaque début d’heure et à 06h00, tout était normal» a expliqué M. Lernout, «et c’est une heure plus tard que deux surveillants ont constaté le suicide».

D’après les premières constatations effectuées par le médecin légiste, l’asphyxie aurait été extrêmement rapide, a précisé le procureur adjoint. Jean-Pierre Treiber n’aurait cependant jamais manifesté de désir de mettre fin à ses jours, selon les syndicats Ufap et FO. «Selon les informations que j’ai, il n’aurait pas été demandeur d’un suivi particulier sur un plan psychologique», a précisé M. Lernout.

Un message a été retrouvé, écrit sur la chemise dans laquelle Jean-Pierre Treiber rangeait son courrier: «J’en ai marre d’être pris pour un assassin et privé de ceux qui me sont chers. JP», selon les informations du parquet d’Evry.

L’enquête a été confiée à la brigade de recherche d’Evry qui a déjà procédé à l’audition de plusieurs membres du personnel pénitentiaire.

 

Roland Giraud: «Je suis furieux et effondré»

«Je suis furieux et effondré. Ca ne me rendra pas ma fille. On aura tout, jusqu’au bout et même le pire», a réagi sur Europe 1 le comédien Roland Giraud, père de Géraldine, dont le corps avait été retrouvé avec celui de son amie Katia le 9 décembre 2004 au fond du puisard de la propriété de Treiber à Villeneuve-sur-Yonne (Yonne).

Ce geste, «c’est l’aveu suprême surtout quand on a dit qu’on ferait face à ses juges, un innocent ne se dérobe pas», a jugé Me Francis Szpiner, avocat de la famille Giraud, joint par l’AFP. «Un procès, c’est une attente, il en résulte pour la famille une frustration terrible», a ajouté Me Szpiner.

Lors d’une audition en décembre, Jean-Pierre Treiber «avait dit au juge d’instruction: "c’est l’évasion ou le suicide"», a rappelé samedi à l’AFP Me Eric Dupond-Moretti, précisant que ses conditions de détention avaient été «nettement durcies» après sa cavale de l’automne. «J’ignore ses motivations profondes et intimes mais je les respecte», a poursuivi Me Dupond-Moretti, «abasourdi» par cette mort.

Les parents de Treiber informés par les journalistes

Les parents de Jean-Pierre Treiber ont été informés de sa mort par des journalistes et l’administration pénitentiaire ne les avait toujours pas prévenus samedi en fin de matinée, a déclaré à RTL la soeur aînée du suicidé, Paulette Stoëcklen.

«Je suis très en colère, parce que je suis chez mes parents, ils ont appris la nouvelle par les journalistes. On n’a aucune nouvelle officielle. Je trouve que c’est pire qu’indécent», a-t-elle déclaré.

«Pas un gendarme ou un policier n’est venu, alors que le jour où il y a eu la perquisition, il y en avait bien une quinzaine. Et là personne, alors que leur fils est mort. Il n’y a plus aucun respect (…). Ils sont au bout de leur vie et on les traite comme des moins que rien. Je trouve ça, de la part de la justice française, honteux», a-t-elle ajouté. «Je m’attendais à ce qui est arrivé aujourd’hui, je m’y attendais depuis longtemps», a aussi dit Paulette Stoëcklen, à propos du suicide de son frère.

«Dans ses lettres, il disait toujours "je ne suis pas inquiet, je crois en la justice française. Mais voilà, on m’a toujours dit que, pour pouvoir être accusé, il fallait des preuves, pas simplement des faits. Jusqu’à preuve du contraire, il n’y a pas eu de preuve dans l’histoire"», a-t-elle ajouté.

Un kit anti-suicide?

«Le corps a été découvert par des surveillants pénitentiaires à 07H00 à l’occasion d’une ronde», a précisé Guillaume Didier, porte-parole de la chancellerie. «Cette ronde a lieu toutes les heures et rien d’anormal n’avait été remarqué lors de celle de 06H00».

Treiber était seul en cellule, dans un quartier d’isolement, car il faisait l’objet d’une «surveillance renforcée», notamment en raison de sa récente évasion, a précisé Guillaume Didier.

Une enquête judiciaire a été ouverte samedi matin par le parquet d’Evry. Le ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie a ouvert une enquête administrative, et l’inspection des services pénitentiaires s’est rendue à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis samedi matin.

La Chancellerie n’a pas été en mesure d’indiquer si Jean-Pierre Treiber bénéficiait de ces mesures de protection, mises en place par Michèle Alliot-Marie. Selon les syndicats (FO et l’Ufap), Treiber ne disposait pas du «kit de protection». «Le personnel surveillant de la maison d’arrêt de Fleury n’a pas reçu de consigne» pour octroyer ce kit à Jean-Pierre Treiber, a indiqué Marcel Duredon, responsable du syndicat FO Pénitentiaire à Fleury-Mérogis. «Il n’a pas laissé d’élément indiquant qu’il pouvait attenter à son intégrité physique», a-t-il ajouté.

«On ne donne pas le kit à tous ceux qui disent qu’ils vont se suicider. Treiber n’avait jamais fait de tentative de suicide. On ne donne ce kit qu’à ceux qui ont déjà essayé de mettre fin à leurs jours», a poursuivi Stéphane Brasdefer, représentant du syndicat Union fédérale autonome pénitentiaire (Ufap). Il a précisé que certains détenus parvenaient quand même à fabriquer des tresses avec des draps ou de pyjamas indéchirables.

Treiber n'a jamais cessé de clamer son innocence

L’ancien garde-forestier avait été renvoyé devant les assises d’Auxerre pour «enlèvements et assassinats» alors que la tante de Géraldine Giraud, Marie-Christine Van Kempen, mise en examen pour «complicité d’assassinats», avait elle bénéficié d’un non-lieu.

Malgré des éléments à charge accablants - il avait notamment utilisé les cartes bancaires des deux victimes-, Treiber, écroué depuis le 25 novembre 2004, n’a jamais cessé de clamer son innocence.

Il s’était évadé le 8 septembre 2009 de la maison d’arrêt d’Auxerre et avait été repris le 20 novembre à Melun, au terme d’une cavale rocambolesque dont la forte médiatisation avait été dénoncée par la police et la justice, tournées en dérision. Il était incarcéré à Fleury-Mérogis depuis cette date.

(Source AFP)

Retrouvez une sélection d'articles, portraits et repères dans notre dossier spécial.

Vos commentaires

382 commentaires affichés.

À la une de libération.fr